Juillet 4, 2011, Metis (Paris), « Du travail des caissières à une critique politique du travail » Interview par Clotilde de Gastines
Entretien avec Isabelle Ferreras, professeur de sociologie à l’Université de Louvain, qui établit une critique politique du travail à l’issue de son enquête sur les caissières de la grande distribution en Belgique
Votre théorie sur le travail tirée de 6 ans d’enquête ethnographique auprès des caissières de la Grande Distribution insiste sur leur conception de la justice. Vous constatez le passage d’un modèle d’interaction domestique (imposé par la hiérarchie) à un modèle d’interaction démocratique (souhaité – îlot-caisse).
Les caissières sont un cas très pertinent pour réfléchir sur le secteur des services. Elles sont en contact permanent avec la clientèle en présence de leurs collègues de travail. Ce métier est aussi en bas de l’échelle des compétences et des salaires. On imagine que c’est typiquement le genre de métier que l’on ne choisit pas, qu’on choisit par défaut, simplement pour le salaire. Or la dimension instrumentale n’est pourtant pas dominante au travail, car il existe une dimension expressive forte. Mon enquête relève un sentiment d’autonomie, le sentiment de rendre un service utile, à ses collègues ou à l’entreprise, voire même parfois un intérêt pour la tâche.